samedi 9 août 2008

Jour 56: Le plan

82 km. Cum: 8198 km.


Langley, BC - Exception faite des conseils éclairés des bonhommes qui sentent le whiskey, je vous ai déja expliqué qu'il valait mieux comme cycliste prendre les indications des non-cyclistes avec un grain de sel. Ce matin au check-out, je demande à la fille si le quai pour le traversier est bien loin. Probablement conditionnée à répondre en minutes de voiture, mon accoutrement la fait hésiter. Je propose: "2 ou 3 milles ?". "Ah non, comptez plutôt 5 ou 6 milles". Eh maudit, c'est le temps que je décolle alors ! Finalement, le quai est à 3,3 km (un poil au dessus de 2 milles). Probablement que les nombreux feux de circulation donnent l'illusion d'une plus grande distance. Il y a aussi qu'on vit avec des horaires. On sait à quelle heure il faut partir de la maison pour arriver à temps à la réunion de 8:00, mais si l'assureur-auto ne nous le demandait pas, on serait pour la plupart ignorants de la distance qui nous sépare du boulot et des traversiers.


J'avais compris 45 minutes, mais c'est 1hr45 qu'il faut compter pour se rendre à Victoria. Le support à vélo est situé à l'extérieur sur la proue et croyez-moi qu'au large, Cannondale s'est fait brasser. J'ai sorti quelques fois, patinant sur le pont avec mes souliers de vélo pour m'assurer que mon bolide était solidement ancré. J'ai bien fait de bien m'habiller. Parti à 8:20, on accoste à 10:00. La douane canadienne est tellement plus sympathique que sa consœur américaine. Après avoir entendu mon itinéraire et vu la petitesse de mon bagage, le douanier m'a dit: "Bienvenue à la maison, même si t'es loin d'être rendu. Je te demanderai pas si t'as fait des achats, parce que je ne vois pas où tu les aurais mis".


À Victoria alors, un peu plus tard que je croyais. Très belle ville. En arrivant du ferry, le parlement d'architecture classique donne le ton. C'est propre et très cyclable. J'ai trouvé un peu par hasard un café que j'avais vu sur une carte touristique, le Café du Vieux Montréal. Ce n'est pas assez de dormir dans 54 endroits différents en 55 soirs, j'impose à mon cerveau de commander mon premier repas en Colombie-Britannique en français avec Wilfred Lebouthillier en musique d'ambiance et des photos de Montréal sur les murs. Je suis où là au juste ? Je converse avec un expatrié de Rigaud qui demeure ici depuis 9 ans. Il aime l'endroit et participe beaucoup à la vie francophone très active ici.


Après mes oeufs bénédictine et mon café latte, je vais faire le plein de Gatorade, prêt à partir, mais je ne peux m'empêcher d'arrêter quand je passe en face de Mountain Equipment Coop (MEC). Je l'ai déjà mentionné, mais ce genre d'endroit est jouissif dans ce genre d'expédition, même si je n'achète que des cartouches de CO2. Je rencontre un couple de francophones que j'aborde juste pour le plaisir de parler en français. À la caisse, je mentionne que je me départirais bien de mon seul item inutile, mon couvre-casque, prêt à le laisser pour rien aux articles usagers au lieu de le jeter. En plus, je l'ai acheté chez MEC. Je n'en croyais pas mes yeux, mais elle me l'a remboursé intégralement. Avez-vous réalisé qu'il s'agit d'un article expédié de Vancouver à Bromont qui a fait plus 8000 km par voie terrestre pour être retourné au magasin ? Un retour de marchandise sans précédent...


Avec tout ça, je prends la route 17 vers midi quinze en direction nord afin de traverser la péninsule Saanich pour rejoindre le traversier de Swartz Bay qui mène à Vancouver. Poussé par le vent du sud, je couvre les 30 km en une heure. Je me rends compte que je devrai me réhabituer à certaines canadienneries. L'essence est passé de 4,10 $ du gallon à 1,42 $ le litre. Même si je n'en consomme pas, ça fait partie de mon univers quotidien. Les milles sont devenues des kilomètres. Un premier Tim Hortons, une banque CIBC, un Canadian Tire. En payant mon passage de ferry, je réalise que mon portefeuille Ziploc va s'alourdir considérablement de huards et d'oursons si je ne fais pas attention. Bienvenue chez-nous.


À la guérite, je rencontre Scott qui est au milieu d'un tour de l'ouest avec son vélo pliant et moins de bagages que la moyenne. Vraiment surprenant qu'on puisse faire quelques milliers de km sur un tel engin. Je monte sans problème sur le ferry de 14:00. Ici aussi j'avais mal estimé le trajet, c'est 1hr45 plutôt que l'heure que je m'étais imaginé. Autre détail important, le traversier accoste à Tsawassen, 35 km au sud de Vancouver. Hier, comme j'avais cru passer quelques heures dans la grande ville pour ensuite aller dormir en banlieue, j'ai réservé à Langley, 45 km à l'est de Vancouver. Accosté à 15:45 , j'ai vite compris que je ne verrais pas Vancouver dans ce voyage. J'ai alors roulé dans l'air pur de la campagne, puis dans le monoxyde de carbone de la banlieue pour arriver au motel à 17:45.


Il faut toujours être prêt à changer le plan, surtout quand le plan est rempli d'imprécisions qu'on a nous-mêmes calculées. Je ne verrai ni Toronto, ni Montréal dans ce voyage alors passer dans la métropole de l'ouest aurait déséquilibré ce voyage. N'importe quoi. La quintessence du voyage de vélo se trouve à la campagne après tout. Vent couver.


49.1124, -122.6784

2 commentaires:

Anonyme a dit...

Tout comme ton douanier Eric je te dis: Bienvenue à la maison! Wow!Tu en as fait du chemin! C'est toujours un plaisir de te lire et de voir le monde avec ton regard, tes commentaires, tes questionnements et de savourer tes photos. Un beau bonjour à El Macaire et Jeepee. Leurs liens avec votre enfance, et le bas du fleuve me font souvent sourire. Nancy

Unknown a dit...

Salut Éric,

Welcome in Canada!!

J'avais pris un peu de retard dans la lecture de ton blog.

Si tu crois que Dieu a créé Chuck Norris avant la lumière, et bien en suivant ton raisonnement, et au risque de blasphèmer, je crois sincèrement que dans le cas de Bush on devrait penser à un trip d'acide et pour ce qui est de Jean Chrétien, je pense sérieusement que Dieu a perdu un pari avec le Saint-Esprit.

Vent de oops!