samedi 23 août 2008

Jour 66 + 5: Une niveleuse pour Bill

0 km. Cum: 9322 km.


Moose Jaw - Qu'est-ce que vous feriez si vous gagniez des millions ? C'est Bill mon co-chambreur qui a soulevé la question. Il racontait qu'un groupe de la Saskatchewan s'est récemment partagé un gros lot de plusieurs millions et nous nous sommes mis à discuter du destin typique des nouveaux millionnaires.


À 80 ans (et demi), Bill est ici pour un deuxième genou. Un fermier encore actif, sa famille aura beaucoup de difficulté à le garder à la maison à son retour. Il espère pouvoir superviser la récolte depuis son cart de golf. Canola, orge, blé, avoine et paille, tout ce lot de céréales doit être cueilli selon une certaine cédule qui peut varier selon les aléas de la météo. Il y a toujours quelques paris à faire en espérant optimiser le rendement. Le gel, la forte pluie et la grêle peuvent tout chambouler.


L'autre soir, l'orthopédiste venant de lui annoncer qu'il devait rester hospitalisé deux jours de plus, sa fille offre de lui apporter son laptop avec quelques films. Avec les écouteurs et ses appareils auditifs, il pourrait bien entendre. Bill ne veut pas, car de toute façon, dans les films d'aujourd'hui, l'action commence en 1995 et rendu en 1996, ils se rendent compte qu'ils ont oublié de nous en conter un bout et on se retrouve en 1980 pour éventuellement finir dans le rêve futuriste d'un personnage qui se déroule en 2006. En bas d'un bon vieux John Wayne, ça ne vaut pas. Si jamais je réalise un film, je n'inviterai pas Bill à la première. Mon film enchaînerait les scènes ayant pour fil conducteur une suite de personnages tous à cheval sur deux tableaux et il se terminerait en revenant à la toute première scène en s'étant enroulé sur lui-même mystifiant le spectateur. Ça s'appellerait Le Ruban de Moebius. Vous pouvez me voler mon idée, en publiant ce texte, j'officialise mon droit d'auteur. Pas sûr que c'est clair de toute façon.


Bill et moi, on a cependant la même vision pour ce qui est de gagner le million. Premièrement, les taux d'intérêt sont tellement bas, il faudrait continuer à travailler. Un certain Sylvain m'a déjà dit que s'il gagnait le million, sa France devrait continuer à travailler. Bill, comme moi, continuerait sa vie normale en vaporisant de l'argent autour de lui, mais pas trop pour ne pas bouleverser la vie de ses proches, trop d'argent causant souvent plus de tort que de bien. Comme je lui précisais que j'en profiterais pour voyager un peu plus, il a candidement avoué que lui craquerait pour un gros jouet. Je pensais qu'il dirait une moto ou un gros 4X4, mais non. Bill se payerait une grosse niveleuse (un grader en bon québécois). Il m'a expliqué avoir manœuvré ça pendant vingt ans avant de devenir fermier à temps plein. Il a construit des milles de chemin à lui seul en utilisant ce seul engin, manœuvrant les steering-clutches comme un artiste le pinceau. Aujourd'hui, lorsqu'il passe sur une nouvelle route, il porte plus attention au fond de chemin qu'au paysage, rêvant de réparer tous les trous et les bosses avec son hypothétique niveleuse.


Libéré de mon poteau, j'ai pris un bol d'air aujourd'hui en sortant dans l'aire de pique-nique. Ça fait du bien de goûter le soleil et sentir le vent nord-ouest 5 à 10 km/h. Déjà un peu nostalgique de ne plus faire de vélo, je me suis payé mon voyage à l'envers en photos cherchant à montrer à Bill les bidules d'irrigation que j'avais vus. Les visiteurs de Bill se désolent que je ne puisse mieux visiter leur ville. C'est vrai que j'aurai passé plus de 14 jours ici. Je les ai consolés en disant que lorsque j'évoquerai l'été 2008, je serai forcé de dire que je suis allé passer deux semaines à Moose Jaw. C'est juste que j'ai fait un long détour pour m'y rendre.



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2 commentaires:

Anonyme a dit...

Salut Eric, ils ont raison tes nouveaux amis, tant qu'à être à Moose Jaw autant en apprendre un peu...Je te taquine, mais si ça t'interesse, voilà l'info...Fondée il y 100 ans, Moose Jaw vit principalement de l'agriculture, de la culture du blé (comme ton ami Bill 80 ans dont tu as raison d'être impressionné!!!) et du tourisme. La ville de 32 515 habitants compte ainsi 685 francophones. D'abord explorateurs et traiteurs de fourrure, les francophones se sont établis dans cette région dès 1885.

Moose Jaw, compte de vastes réseaux de tunnels souterrains. Au début du 20e siècle, des milliers de travailleurs chinois oeuvraient dans des conditions misérables pour construire le chemin de fer pan-canadien. Lorsqu'il fut terminé, un groupe de Chinois a évité l'expulsion vers son pays d'origine en creusant des tunnels sous la ville.

Les Chinois y ont vécu clandestinement durant une longue période. Des entreprises, dont une buanderie, ont traité ces immigrants illégaux comme des esclaves. Travaillant de très longues heures à l'année dans ces souterrains pour un salaire de misère, ils étaient malmenés par une société qui n'avait pas une grande estime d'eux.

Les tunnels sont encore là aujourd'hui, et un musée présentant des visites guidées et animées retrace l'histoire tumultueuse de la ville. De l'autre côté de la rue principale, un autre réseau de tunnels fut aménagé à l'époque du célèbre Al Capone et de la prohibition d'alcool. Le célèbre bandit y a déjà séjourné et encore là, on peut visiter ce monde souterrain truffé de portes secrètes et d'accessoires de l'époque.

J'ai aussi trouvé une chanson sur Moose Jaw mais... je ne pense pas que c'est la plus grande fierté de la place...
Salut! Je suis contente que tu puisse enfin sortir dehors! Nancy

Anonyme a dit...

Je me souviens de Moose Jaw un peu, car avec les vieux hélicoptères Sea King, on s'était rendu à Portage la Prairie. (J'imagine qu'aucune ville n'avait revendiquée la Prairie alors. Pourtant, la suggestion est omniprésente dans le paysage.) Il y avait à Portage une petite école de pilotage des forces armées. L'idée était d'impressioner les jeunes apprentis pilotes avec le Sea King pour recruter quelques-uns d'entre-eux.

Ce qu'il faut savoir par contre, c'est que ces grosses libellules sont très souvent à bord d'un navire. Ho, ho, ho et une bouteille de rhum....

Ton Bill vivrait un méchant trip avec Saint-Louis du Ha! Ha! Le paysage n'est plus le même. Un gros trou de chaque côté du chemin des Raymonds. Des gros camions que l'on aperçoit habituellement dans les excavations minières, des bulldozers à la douzaine , autant de pelles hydraulique et des rouleaux compresseurs...mais pas de niveleuse. (faute de ne pas avoir de Bill, je suppose) Leur technique consiste à étendre le sable, le compresser, mesurer avec un GPS et recommencer.

Prompt rétablissement aux deux !

Macaire