Moose Jaw, SK - Un superbe matin ensoleillé, un vent SSO, une bonne nuit de repos, tout était en place pour une journée d'anthologie, probablement un beau 250 km jusqu'à Régina, sans aucun doute un 175 jusqu'à Moose Jaw. Parti à 7:45 après un copieux petit dej, j'ai rapidement pris un rythme des grands jours. À 11:30, après plus de 90 km, je suis déja à Chaplin où les mines de sel ressemblent à de hauts bancs de neige.
J'y ai fait une pause et je suis reparti à midi. L'accotement qui depuis Maple Creek était large de 4 à 6 pieds, devient un mince corridor d'à peine 1 pied. Je me dis que ça ne peux sûrement pas durer. Si ça persiste comme ça, je devrai sortir la carte et prendre une route alternative. Même pas 5 km de fait, bang! Me voilà projeté sur la route par la remorque d'un pickup qui transporte je ne sais quoi de bidules agricoles.
Tout se passe à une vitesse effarante comme il y a moins d'une semaine. Je suis en vie. Good. Mes jambes bougent. Good. Je ne me suis curieusement pas frappé la tête. Good. Oops, mon bras gauche est rendu avec deux coudes. En une fraction de seconde, je comprends la conséquence. Voyage terminé.
Quantité de personnes bourdonnent autour de moi. J'entends le chauffeur du pickup expliquer qu'il a dû serrer à droite après m'avoir doublé, car une voiture le dépassait. Un des automobilistes a une trousse de premiers soins et panse mon avant-bras du mieux qu'il peut, d'autres me soustraient au soleil, un autre s'occupe du 911. L'ambulance arrive de loin, peut-être 20 minutes plus tard, mais tout est long dans ces moments là. Ils m'ont immobilisé comme c'est normal de le faire, mais qu'est-ce que c'est long quand on a une nouvelle penture, ouverte en plus. Chantal et Debbie font de leur mieux. Enfin dans l'ambulance, ils m'annoncent s'être rendu compte que la climatisation est en panne. Il fait chaud en ta.. là-dedans, surtout avec le gréement qu'ils m'ont installé autour du cou pour m'immobiliser. Il me semble que j'étais proche de Moose Jaw, mais c'est sûrement la chaleur qui me fait croire que ça aurait été plus vite en vélo.
Le médecin de garde, le chirurgien et l'anesthésiste sont tous d'Afrique du Sud. C'est là que la Saskatchewan a trouvé sa source pour les professionnels de la santé. Ironiquement, ce sont tous des cyclistes. En se lavant les mains, le chirurgien m'explique qu'il s'agit d'une fracture ouverte du radius et du cubitus gauche et que je pourrais perdre l'usage de mes doigts, mais de ne pas m'inquiéter, ça devrait aller. J'aime ça la franchise, pour le tact on repassera.
Un certain Steve a apporté mon vélo qui semble encore en parfait état. Une belle carte de visite pour Cannondale. Vers six heures, on m'amène en salle d'opération, juste comme un policier arrivait pour compléter son rapport. Il devra repasser. Pour l'instant, on va nettoyer, drainer et me mettre un soutien rigide temporaire. Demain, on va peut-être répéter l'exercice de nettoyage, pour éventuellement poser des plaques, des vis et un plâtre. J'en ai pour trois jours ici, minimum.
Le réveil aux soins intensifs est un peu paniquant. C'est comme sortir d'un cauchemar ou se réveiller en altitude en train de pâmer. Je n'ai jamais été anesthésié, c'est une première pour moi. Je boirais une citerne. Après une heure, on me monte à ma chambre où je me lève debout pour la première fois en huit heures. Mes doigts bougent et mon bras n'est pas trop souffrant.
Malheureusement, mon odomètre s'arrête ici. Je trouve extrêmement dommage que ça se termine comme ça. J'aurais aimé finir ça sur l'asphalte maganée de la rue Shefford. Oui bien sûr je suis en vie et je pourrai continuer toutes mes activités une fois "réparé". Cependant, mon souvenir et toute l'inspiration que portait cette entreprise dans le sens de réaliser ses rêves et d'oser se commettre dans quelque chose d'audacieux sera à jamais terni par ce bête accident. Vent de déjà-vu.
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16 commentaires:
Hey Éric, ainsi va la vie.. on ne sait jamais ce que sera demain. Tu nous as tous conduit à travers une belle histoire. As-tu vu le film "Miss Potter" ? Elle dit :"Ce qui est amusant avec l'écriture d'une histoire, c'est que tu sais comment ça commence, mais tu ne sais pas où ça va se terminer !". Merci pour cette aventure que tu nous as fait vivre. Vent de paix !
Nos pensées positives sont avec toi Éric , Tout ce que tu as réalisé, personne ne pourra te l'enlever. Ton aventure est exceptionnelle. Félicitation et a bientot.
Pierre D.
Éric,
Tu ne peux pas savoir comment je suis content de lire tes lignes ce matin. Ayant été mis au courant que tu étais endormi à l'hôpital de Moose Jaw avec une blessure importante au bras... J'avais la tête pleine de questions...
Fidèles à tes habitudes, tu as pris le temps de mettre tout tes supporteurs au courant en écrivant ces lignes tard dans la nuit...
Bien que ce n'est pas la fin que personne n'aurait désiré, tu as tenu le coup jusqu'au bout. Ceci en affrontant le vent, la chaleur, la pluie, les montagnes, la brume, la faim, la soif et j'en passe. Tu t'es adapté à ce mode de vie d'itinérant de manière exemplaire. Ceci est la marque d'un homme courageux et fier qui mérite le respect de tous.
Si tu as besoin de quoi que ce soit! N'hésite pas, on est là!!
La mauvaise nouvelle, si je me fie au titre de ton dernier posting est que c'est game over. En fait, à mes yeux, c'est loin d'être game over... Tu ne fais que passer à une autre destination dans ton voyage qui est celui de la vie.
La BONNE nouvelle maintenant, tu n'aura pas à te taper le boutte plate de longtario... évidemment, cela dépend du point de vue de celui qui regarde mais bon...
On a tous hâte de te revoir au boulot... take care et je termine en disant... Ça t'apprendra à jouer du coude à Vélo ;)
Ps. Ton blog de vélo-réalité est de loin plus intéressant que Loft Story... Peut-être qu'un sujet intéressant à philosopher serait celui de l'importance et l'apport du "sensationnaliste" chez l'être humain... Talk to you later !
Le simple fait que je puisse dire, jusqu'à la fin de mes jours "Je connais un gars qui a pris un congé sans solde pour faire un voyage en vélo complètement épique coast-to-coast." me remplit de fierté. Tu es une inspiration pour beaucoup plus de gens que tu ne le penses, je ne connais personne d'aussi "complet", un intellectuel doublé d'un athlète accompli qui nous a fait rêver pendant deux gros mois. À te lire, on imagine un vieillard érudit de 60 ans et à te voir aller en bike, on imagine un jeune de 20 ans qui consacre ses journées au vélo. Quel être exceptionnel, je te lève mon chapeau Éric, on a hâte de te revoir.
Marco P.
Éric,
Tu connais le proverbe : "Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort", mais là franchement il semble que le destin ait décidé d'accélérer ton renforcement dans la dernière semaine. Ton kilométrage externe se termine pour le moment, mais l'important est que le kilométrage interne continue.
Bravo !!! c'est incroyable ce que tu as pu accomplir jusqu'à présent. Comme le disait un grand athlète, "ce n'est pas toujours la médaille qui est importante mais le cheminement, la préparation et la détermination mentale de se dépasser."
La tienne t'attend toujours et tu l'auras bien méritée !!!
Après ces commentaires, je manque de vocabulaire pour ne pas répéter ce que tous pensent. 9322 bravos! D'accord, ce n'est pas un chiffre rond, mais il est rationnel celui-là.
Le chiffre qui n'est pas rationnel, c'est celui des air miles que tu cumule depuis que tu mouline du côté canadien. J'en viens à penser que la meilleure place pour un vélo au Canada, c'est au beau milieu de la voie, comme n'importe quel autre véhicule.
C'est une fin déconcertante et dérangeante, alors que tu peinturais une fresque avec ton cannondale de part en part du continent. Mais l'accomplissement en n'est pas moindre parce que tu es assis dans un hopital de Régina. Bien au contraire.
Nous sommes tous déçu que la fin de notre aventure litéraire se termine avec ce facheux accident. Mais nous, on était tous en sécurité derrière notre écran d'ordinateur, sans mouliner, sans humer l'air des montagnes et sans larmoyer à cause d'un vent de gueule. Mais on était tous avec toi pour la ride et nous en sommes tous plus grand aujourd'hui. Merci 9322 fois pour avoir si généreusement partagé ton aventure et ses moments inoubliables.
Vent de fierté
Macaire
P.S. As-tu songé de rentrer à pied? Faire du pouce, maintenant qu'il est dans le plâtre?
Cher Éric, on veut d'abord te dire comme on t'aime et qu'on t'envoie plein d'ondes positives!!! Saches que mammie s'en allait justement faire un pélerinage aujourd'hui et qu'elle a dit qu'elle allumerait un géant lampion pour toi alors ne t'inquiète plus, tout est prit en charge. Sérieusement Éric, ton histoire exprime bien l'expression être chanceux dans sa malchance. Tu peux décider de garder en mémoire tout le beau voyage et d'oublier la finale. Michael est très bon pour éjecter les mauvais souvenirs, il te fera un cours en allant jouer au pool la semaine prochaine, oups peut-être plutot à la pétanque ou aux cartes d'une main. Les enfants t'ont fait une belle carte.
Rassure toi en te disant que tu es déjà sur la liste d'attente au CLSC et que tu sera surement P1.
On t'attend, Isabelle et sa famille
Cher Éric, on veut d'abord te dire comme on t'aime et qu'on t'envoie plein d'ondes positives!!! Saches que mammie s'en allait justement faire un pélerinage aujourd'hui et qu'elle a dit qu'elle allumerait un géant lampion pour toi alors ne t'inquiète plus, tout est prit en charge. Sérieusement Éric, ton histoire exprime bien l'expression être chanceux dans sa malchance. Tu peux décider de garder en mémoire tout le beau voyage et d'oublier la finale. Michael est très bon pour éjecter les mauvais souvenirs, il te fera un cours en allant jouer au pool la semaine prochaine, oups peut-être plutot à la pétanque ou aux cartes d'une main. Les enfants t'ont fait une belle carte.
Rassure toi en te disant que tu es déjà sur la liste d'attente au CLSC et que tu sera surement P1.
On t'attend, Isabelle et sa famille
Salut Éric!
Le commentaire de Marco résume bien ma pensée. Tu es vraiment un être exceptionnel et même si ton voyage prend fin beaucoup plus tôt que prévu, ce que tu as accompli est incroyable. Personnellement, je n'aurais jamais été capable de remonter sur mon vélo après le premier accident.
Au plaisir de te revoir au bureau en un seul morceau!
Ouf, effectivement tu nous en fais vivre de toutes les couleurs... Tous ces commentaires te montrent à quel point tu es (et non pas "a été")une inspiration pour nous tous. Personnellement je n'aime pas ton titre mais bon, jamais j'oserais compétionner sur le côté écriture avec toi on se comprends la-dessus! J'aurais préfèré un titre du genre "Next !" ou 'See ya next time..." ou ... je vais arrêter ici... L'ironie la-dedans comme je le disais à Monia hier soir à son appel à 20:00, c'est que nous venions à peine de sortir de table et nous avions passé le repas à discuter de ton aventure que les enfants suivent à travers mes lectures, mais en expliquant un peu plus en détails les dangers réels, en relatant la passe de kicking truck et les incidents de pneu du week-end... et 5 minutes plus tard l'appel téléphonique qui m'assome... BONNE NOUVELLE you'll be ok... Ce n'est pas écrit nul part je crois mais je constate que c'est sûrement ton bras gauche étant donné ton texte de cette nuit... Et si c'est ton bras droit alors là chapeau...
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Comme déjà mentionné à Monia, je n'attends qu'un signe du doigt pour faire les 2900Km qui nous séparent pour te ramener...
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Take good care of you buddy!
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... Quelle sensation étrange de te lire ce matin...
Un mélange de surprise, d'étonnement, de tristesse, de mélancolie...
Certes, on te croyait somme toute moins invincible depuis le col du Kicking Horse, mais on n'a jamais douté que tu arriverais à destination sur ta selle... comme quoi 10 000 km en bécyk n'est pas sans son lot d'incertitudes et de risques (ha! ouais ?!?).
Eric, notre reporter privé, notre Tintin Bromontois, tu as transformé notre quotidien des derniers mois de facon fort agréable ; nous avons vue une partie du monde à travers ton regard d'aventurier, regard tantôt objectif, tantôt subjectif, tantôt sérieux, tantôt analytique, tantôt amusé, tantôt rieur...
A quelque part, on n'a eu qu'à se laisser porter par le récit passionnant de tes aventures, pendant que toi tu te défoncais sur Cannondale en avalant les kilomètres à la centaine.
Sois fier ! Gardes la flamme qui t'anime!
Félicitations et bonne guérison (physique et mentale)!
Vent d'accomplissement !
Michael G.
Éric, ton aventure est exceptionnelle. Ce n’est pas le courage ou la persévérance qui t’ont fait défaut mais tout simplement le hasard qui te ramène plus vite à la maison. L’important n’est pas tant dans l’atteinte du but fixé mais dans l’approche que nous prenons pour y parvenir et dans le partage de notre expérience avec ceux qu’on rencontre, ceux qui nous entourent. Tes qualités tant intellectuelles que personnelles m’ont toujours impressionnées mais celle que j’ai découverte récemment me fascine le plus… cette capacité de transmettre aux autres tes connaissances à travers tes récits est formidable! Ton blogue fut notre passeport vers une liberté que peu d’entres nous n’osent s’offrir…Chapeau Éric!
France P.
Salut Eric,
je partage également tous les bons mots et commentaires qui ont été mentionnés précédemment, je te félicite pour ce que tu as réalisé, c'est tout un exploit ! Prompt rétablissement, prends soins de toi, on a hâte de te revoir !
Sylvain M.
Salut Eric, je t'ai accompagné par la pensée toute la journée, suite à la lecture de ton facheux incident ce matin. Le seul mot qui me venait en tête c'est "courage"... celui dont tu as fait preuve depuis 65 matins à te lever et à parcourir bout à bout notre continent, et celui qui te fera, j'ai confiance, te relever de cette épreuve. Regarde tout ce chemin que tu as parcouru... c'est exceptionnel !!! Mon soulagement est que tu sois encore avec nous. Comme tu le vois, nous sommes plusieurs à avoir bien hâte de te revoir.
- JLH
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