dimanche 10 août 2008

Jour 57: Baptême de Transcanadienne

122 km. Cum: 8320 km.


Hope, BC - Je parlais des canadienneries qui m'avaient accueilli hier. Une très belle canadiennerie, merci au CRTC, c'est l'obligation pour les cablôdistributeurs d'offrir Radio-Canada dans les deux langues officielles partout au pays. Quel joie de pouvoir écouter le Téléjournal pour une première fois depuis belle lurette et d'avoir la description de la cérémonie d'ouverture de Beijing par Richard Garneau. Non mais avez-vous vu l'allumage de la vasque par le gymnaste qui a couru tout le tour du stade suspendu dans le vide ? J'avais la chair de poule, c'était splendide.


Je retrouve aussi le pendant anglophone de Météomédia. C'est la même musique pour les prévisions locales et j'avoue que je fais parfois quelques pas de danse sur cette mélodie, Monia peut en témoigner. Je me faisais aller les pleumas gaiement quand j'ai réalisé que ce serait de la flotte aujourd'hui. Une première fois depuis le Montana, on ne s'en plaindra pas.


Ce matin, ayant déjà une réservation pour ce soir à Hope à environ 120 km, nul besoin de se presser. Au resto à huit heures, je commande un déjeuner, puis un autre. Comme la serveuse est aussi assidue avec son pot de café que la bancale Evelyne des Dames de Pique (RBO 1988), je me laisse caféiner joyeusement en regardant tomber le déluge. «Voulez-vous un p'tit café ?». Dehors, le préposé à l'entretien passe la tondeuse comme si de rien n'était. Moi qui n'a pas une grande passion pour le gazon, je m'interroge: Pourquoi évite-t-on de tondre à la pluie ?


Je finis par partir passé neuf heures lors d'une accalmie. Je roule un long couloir urbain qui se trouve à être la continuité banlieusarde de la veille. On reconnait facilement un endroit où la neige ne s'accumule pas: À l'approche de certaines intersections, il y a quelques rangées de petites bosses fluorescentes collées sur l'asphalte pour avertir les distraits. J'appelle ça des stops en Braille. Au Québec, la charrue aurait tôt fait de tout arracher ça à la première neige. En guise d'avertissement, il y a aussi des panneaux dont les clignotants s'activent pour préparer les automobilistes à s'arrêter quand la lumière va tourner au rouge, l'équivalent de notre "Préparez-vous à arrêter quand les feux clignotent". Ici, ils croient bons nommer la couleur du clignotant (jaune/amber) sur le panneau et ça donne: "Prepare to stop when amber is flashing". Comme Amber, c'est aussi un prénom féminin, les hommes s'arrêtent un peu plus longtemps pour voir si une Amber a quelque chose à montrer.


Nous entretenons certains préjugés au Québec quant au comportement de nos compatriotes du Rest Of Canada sur la route. Je commence à croire qu'ils n'ont pas le même code de la route que nous. J'ai été surpris de voir une voiture attendre devant un feu vert clignotant avant de tourner à gauche. Passé l'intersection, je me suis retourné pour constater que ça clignotait vert de façon identique en sens inverse (?!?!). Je l'ai revu au moins 10 fois aujourd'hui, alors ce n'est pas le résultat d'une panne. Un ancien expatrié peut-il m'expliquer celle-là ? Moi, quand ça clignote vert, je considère que j'ai priorité dans toutes les directions et que tous ceux qui pourraient me couper sont au rouge.


La pluie s'intensifie jusqu'à me déclencher un fou rire. La pluie a cet effet sur moi, surtout une fois que je suis trempé. Je fais une pause au Starbucks après seulement 27 km, car j'ai faim (?!). J'évite de prendre un café pour éviter la surdose et me rabat sur une espèce de barbotine aux fraises pour accompagner mon carré aux dattes. Je ne suis pas habitué à ces trucs glacés, je tire trop fort sur la paille et ça me donne la sensation de m'être gelé le cerveau. J'ai parfois l'impression d'expérimenter des trucs que j'aurais dû apprendre à 7 ans. Ç'a l'air que si on tourne suffisament longtemps sur nous-mêmes, on vient tout étourdi...


Un peu avant Chilliwack, célèbre pour sa base militaire, j'ai mon baptême de Transcanadienne. Un peu intimidant de rouler sur une autoroute à accès limitée, mais la présence de cyclistes est très bien indiquée par de nombreux panneaux et l'accotement est très généreux. La forte pluie sature la chaussée et fait en sorte que mon baptême en est un par immersion totale. Un camion-remorque à 120 km/h sur la voie de droite a la capacité de me laver complètement à lui seul. J'ai un court répit pour une dizaine de kilomètres sur un chemin parallèle, mais pour les 60 derniers vers Hope c'est le bzz-bzz incessant des gros camions avec la douche grasse qui les accompagne.


La pluie me fait rire, mais m'empêche de faire de belles photos. Le plafond est trop bas pour pouvoir bien apprécier le paysage. Dommage car je roule entre deux murs de montagnes qui mériteraient quelques salves de Canon si le temps était plus clément. Je ne sais pas si je suis venu à bout de l'étanchéité du GPS, mais il a complètement gelé à l'arrivée. Il s'en est heureusement remis dans la soirée. L'autre désagrément de cette flotte, c'est le nettoyage de ma monture à l'arrivée. Je n'ai jamais vu mon vélo aussi crotté. Ça m'a pris 45 bonnes minutes juste pour faire le minimum pour que ça tourne rond demain. Ce n'est pas autant l'eau de pluie qui salit que la poussière de route qui est charriée par les éclaboussures. Pendant la soirée le pronostic de demain a tourné à la pluie, ce qui veut probablement dire un nouveau nettoyage demain.


Le vent est du bon bord, la pluie me fait marrer, Tim Horton's est à tous les coins de rue et je dors dans une ville qui a pour nom Espoir (Hope). Je me suis déjà porté plus mal. Ça gaze, tant qu'il y aura des guenilles pour faire briller la bécane. Vent de saleté.


49.3757, -121.4324

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