vendredi 4 juillet 2008

Jour 21: God Bless America

171 km. Cum: 3069 km.


Marshfield, MO - Ça faisait longtemps que je ne m'étais pas levé deux matins de suite à la même place. Je commençais à connaître les aires de ce Holiday Inn. Le coin ordinateur était presque devenu mon bureau une fois le clavier français installé.


Après une razzia dans le buffet-déjeuner, je suis en selle à 7:10. C'est humide et froid, alors j'entreprends la route avec mon jacket. Je roule dans un rideau de brume qui condense à mon contact et je suis totalement trempé en 10 minutes. En fait, je croyais que j'étais totalement trempé jusqu'à ce qu'il se mette à pleuvoir des clous. Exactement comme la pluie qui m'a cloué sur place hier, mais là, comme j'ai déjà 15 km au compteur, on s'en fiche. C'est partir dans la flotte qui rebute, une fois en route, la machine est en marche et tout ce qui manque ce sont des essuie-glaces dans mes lunettes.


Au 40e km, passé Licking (quel nom...), on enlève le jacket. Ça reste nuageux, frais, ça dégouttera un peu de temps en temps, la route sèche, vent faible et favorable la plupart du temps, peu de circulation, bref, conditions idéales pour rouler sans regarder l'odomètre. Pendant un bon bout de l'avant-midi, j'ai roulé en direction de Success. C'était un peu comme si le GPS était devenu un game-boy et que mon but était d'arriver à Success. Arrivé à Success, j'ai pu constater que tous les commerces qui ont déjà eu pignon sur rue dans ce bled témoignent que le nom d'un village n'est jamais un gage de sa destinée, sinon ce village aurait dû s'appeler Failure.


Avant 13:00, je suis à Hartville où je me délecte d'une grosse nectarine, le supermarché étant ouvert à ma grande surprise en ce 4 juillet, fête nationale. La caissière du dépanneur suivant où je me permets une pause repas ne me trouve pas drôle quand je lui explique que je me réjouis de trouver des commerces ouverts. Elle, elle aurait préféré avoir son vendredi férié. Elle s'informe de mon itinéraire et me dit en parlant de tous les cyclistes qui passent sur cette route: "Je ne sais pas comment vous faites ça". Elle me trouve encore moins drôle quand je lui réponds: "On tourne les pédales!".

Encore quelques restants de monts Ozarks sur ma route jusqu'à Marshfield, mais avec seulement 40 km à faire, j'ai pris ça tranquillement au son des pétards qui retentissaient à chaque fois que je m'approchais des habitations. C'est la manifestation festive la plus évidente dont j'ai été témoin. Je m'attendais à voir beaucoup plus de drapeaux et de démonstrations patriotes ostentatoires. Il semble que le sud des USA est moins porté sur ce genre d'excès. Je me suis arrêté spontanément à une maison où deux jeunes enfants s'émerveillaient devant une bombe fumante qui laissait échapper de la boucane bleu-blanc-rouge. Mon retentissant "God Bless America" a trouvé écho chez toute la famille.


"Maman, c'est toi la plus belle du monde, aucune autre à la ronde n'est plus jolie...". Comme mon cerveau ne se passe pas de musique, il y a forcément une trame sonore quotidienne à mes coups de pédales. Souvent dans la campagne tranquille, je chante tout haut. Celle-là, elle est de Luis Mariano et depuis que j'ai vu le film Le Huitième Jour dans lequel un homme d'affaires se lie d'amitié avec un trisomique qui voit Luis Mariano en songe, je me mets à la chanter à chaque fois que j'appelle ma mère. Je l'ai appelée hier et la chanson colle encore. Je vous recommande ce film belge que vous devrai chercher longtemps au club vidéo, car il date de 1996. Je l'ai en VHS si vous voulez. Il y a des lignes mémorables: "C'était une belle minute" et "Je veux chaussures".


Le Missouri n'aura pas été tellement photogénique. Pas question de m'arrêter quand je grimpe et non plus quand je profite d'une descente à toute vitesse. Aujourd'hui, le temps plutôt nuageux n'a pas favorisé la lentille. Au rayon photo justement, Isabelle P laisse entendre que mes autoportraits lunettés et casqués témoignent d'une grande humilité. J'avoue que ce n'est pas très joli, mais c'est ce que les bibittes voient avant de s'écraser dans ma face. Je vais essayer de me montrer sous un meilleur jour. Les vaches et chevaux se sauvaient sur mon passage ce matin.


Un beau 4 juillet roulant, une forme magnifique, les imprévisibles Ozarks qui semblent s'achever, je suis joyeux comme un gars en vacances. Je pénétrerai sans aucun doute dans un autre univers demain en mettant les roues dans la prairie du Kansas. Vent de changement.


37.3427, -92.9283


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1 commentaire:

Unknown a dit...

Salut p'tit frère,
À ton prochain trip en solitaire, engage un caméraman pour te suivre, ça ferait un film incroyable.
Après avoir fait la lecture complète de ton blog, j'ai envoyé une question sur FINAL BATON sur un site qui explique et donne la provenance de nos expressions et le gars est fourré ben raide y'a trouve pas à nulle part...il m'a envoyé 4 courriel en 1 journée. Je pense que ça va être final baton pour son site...

Finalement, c'est vrai qu'is ont des nom de place bizarre, mais je pense qu'on donne pas notre place non plus. Pense à La Tuque, Les Méchins et surtout St-Luc de Vincennes qui aux dernières nouvelles voulait changer pour St-Luc de Trentecennes à cause de la montée du dollars canadien....

Bonne route, sois prudent, je pense à toi,

Jeepee