dimanche 13 juillet 2008

Jour 29: Énergie éolienne

202 km. Cum: 4339 km.


Pueblo, CO - D'abord, je dois ajouter à ma critique de motels. Econo Lodge ne fait vraiment pas de contrôle qualité. Hier, je n'ai pas eu d'eau chaude et plus d'eau du tout une partie de la journée et ce fut au tour de mes amis français plus tard d'avoir un problème du genre. Ce sont des problèmes techniques mineurs, comparé à l'air bête inacceptable de celle qui s'occupe du déjeuner continental. Vous auriez dû entendre le soupir d'exaspération quand Jacques a demandé une cuillère pour manger ses céréales. Bref, n'importe quel zonzon peut avoir la bannière Econo Lodge...


Ce que le vent prend, il le redonne. Aujourd'hui, j'ai carburé à l'éolien. Vent du Nord-est de 10 à 20 milles à l'heure. C'était presque comme faire de la moto, surtout le matin alors que je roulais vers le Sud-ouest. J'ai fait un 10 km en 18:01 sans mérite, juste en donnant deux ou trois coups de pédales de temps en temps et me levant debout comme pour faire une voile de mon corps. Quel beau feeling après deux jours de vent de gueule. Selon Jacques, "vent de gueule" est un italianisme. En France, on dit "vent de poire". Cependant, pour le vent contraire, universellement, c'est "vent de cul".


Ce matin, le paysage me faisait encore penser à l'alti-désert californien avec sa terre sèche et sa végétation chétive. Tout comme sur la route jusqu'à Eads, c'est l'absence qui domine. Des poteaux électriques, deux rails, du bétail lointain de temps en temps, l'horizon vierge, c'est tout ce qui meuble l'espace visuel sous un ciel envahissant. Dans un tel vide, celui qui n'est pas en paix avec soi-même passe sûrement un mauvais quart d'heure. Moi, le vent dans le dos, cette vacuité initiatique me saoule carrément, j'ai la conscience tranquille.


J'ai passé à Haswell où il y a la plus petite prison du pays et à Sugar City où ils ne donnent pas de sucre aux moustiques, car ils ont failli me bouffer complet avant que j'ai terminé ma collation. Je vous jure, douze à la fois. À Ordway, j'ai pris une pause dîner alors que j'avais déjà plus de 100 km de fait sans effort.


Le reste de la route vers Pueblo s'est déroulée très rapidement. Petit à petit, on voit se dessiner une ligne de montagne qui annonce les Rocheuses. Pueblo est une ville moyenne à 1500 mètres d'altitude. Arrivé là, j'ai trouvé un motel situé dans le centre et aussitôt enregistré, je suis reparti avec Cannondale vers la boutique de vélo que j'avais trouvé dans les pages jaunes hier. Plus de 5 km plus loin, je me rends compte que ça n'existe plus, malgré le quart de page de publicité dans l'annuaire. Le GPS me dirige vers Tom Sporting Goods encore 2 km plus loin, mais il y a du contreplaqué dans les fenêtres. Retour vers le centre où un gars en vélo de montagne me donne les indications pour LA boutique de vélo. C'est à deux pas de mon motel &*#$!&*...


La mécano est très efficace. Elle mesure ma chaîne, ce qui signe son arrêt de mort. Après l'installation de la nouvelle, je vais faire un test pour m'assurer que mon jeu de pignons ne rejette pas la greffe, mais quelques bonnes côtes me rassure que ça ira très bien. Malgré que l'heure de fermeture soit passée, elle accepte de démonter mon pneu arrière pour que j'aie le cœur net de cette crevaison lente qui me titille depuis trois jours. Elle change le fond de jante par quelque chose de plus sérieux et me trouve un pneu Armadillo, qui selon Mister Phil, est le roi des longues randonnées. De toute façon, 3000 km pour un pneu de vélo, c'était déjà bon. J'ai refait le plein de tubes et de cartouches de CO2, me voilà rassuré pour un autre 4000 km.


Ce fut toute une journée, et demain, avec le vent du Sud-est, ce sera probablement similaire, car Fairplay semble être ma seule alternative côté logement.


Avant d'arriver à Pueblo, j'ai rencontré un drôle de moineau. Steve du Maryland qui va aussi vers l'Ouest et qui fumait une cigarette quand je suis arrêté lui parler. Il se lève tôt, mais part rarement avant 10:00, car il colle au déjeuner en buvant un dernier café et en en fumant une p'tite dernière. Il a changé de selle en cours de route, il a encore mal au derrière, mais il porte un bermuda. Peut-être qu'un cuissard mon Steve, ça te coûterait moins cher de selles... Toujours de bonne humeur, il finit toutes ses phrases en riant. Il a déjà rencontré les Français ainsi que Dave et Belinda. En voyageant tous sur la même route, on s'informe des autres qu'on a vu avant et de ceux qu'on va rencontrer. Les nouvelles voyagent. Tous ces vélos pourraient remplacer le Pony Express.


Au rayon des rencontres, il y a aussi Jack qui roule vers l'Est. Jack avait commencé avec son fils, mais ce dernier a dû abandonner après deux jours, victime d'une tendinite. Il a alors acheté une voiture usagée et permet à son père de voyager léger en suivant avec les bagages. Jack est directeur de recherche sur le cancer en Virginie et dédie sa traversée à son ami Jim décédé du cancer à 45 ans l'an passé. (www.rideforjim.org). Tout comme moi, Jack trouve qu'un tel périple est un moyen génial de célébrer le privilège qu'on a de pouvoir le faire. Son ami Jim ne l'a pas eu. Souhaitons qu'on élimine un jour ce fléau. Vent d'espoir.


38.2743, -104.6065

3 commentaires:

Unknown a dit...

Salut Éric,

En observant ton itinéraire, j'ai constaté que tu allais passé à quelques kilomètres de Granby... Étonnant!!

Bon vent..

Jeepee

Unknown a dit...

Salut Éric,

j'ai du temps à rattraper je viens de savoir pour ton périple. Je me demandais aussi pourquoi je ne te voyais plus courir dans les rues depuis un certain temps.

J'ai pas mal de lecture à faire donc je me dépêche de lire les chroniques passées et j'essais de te rejoindre le plus tôt possible.

Back to the future...

Famille Beaulieu a dit...

Éric, je me pose la question suivante : est-ce que tu es en avance ou en retard selon ta planification ? Est-ce que celle-ci existe par écrit dans ton blogue ?