dimanche 20 juillet 2008

Jour 36: Vélo stationnaire

123 km. Cum: 5269 km.


Dubois, WY - Comment on fait pour aller à Dubois ? On commence par déjeuner au Family Restaurant de Lander sur le bord de la rivière Popo Agie et on part sur la route 287 vers le nord-ouest. Quand on a grimpé 500 mètres et qu'il y a un regroupement de plus de trois maisons, on est rendu.


Je suis parti à 9:30, bien reposé et sans douleur malgré la galère de la veille. Ça commence assez raide avec une grimpe de 150m dans le premier 5 km. Sinon, c'est une montée très graduelle, quelques replats et quelques descentes à regretter quand on connaît l'altitude à destination. C'est la joie totale, l'environnement est pittoresque comme hier. Certains rochers semblent avoir surgi de terre tout de travers. J'aimerais parfois que mon frère Macaire, scientifique autodidacte, soit là pour faire l'interprétation instantanée de ces phénomènes.


La journée durant, je me trouve dans la réserve indienne de Wind River. Ce sont des indiens Shoshones, tribu dont Sacagawea est issue, cette squaw de l'expédition de Lewis & Clark qui fut achetée (!) par Charbonneau, le Canadien-Français du groupe. On évoque l'histoire des Shoshones sur des panneaux d'interprétation le long de la route. Le grand-chef Washakie a sûrement négocié une clause pour les grands honneurs dans ses tractations avec les blancs, car tous ces repères historiques louangent son leadership et son grand courage. Quel contraste après mon passage à Fort Larned au Kansas où on s'amuse à remémorer le massacre des indiens à coups de reconstitutions à grand déploiement.


La Wind River, littéralement la rivière du vent, porte très bien son nom, car au km 80, alors que la route et la rivière se rencontrent, à 13:20 exactement, le vent de l'ouest se lève. Aucune bourrasque annonciatrice, ça commence comme ça, aussi violemment qu'hier directement de l'ouest. Ah la vache ! Il me reste encore une quarantaine de km et je sais que ce sera infernal et interminable. Je commence à me demander si cette traversée du Wyoming n'est pas en train de se transformer en pèlerinage à Yellowstone pour m'affranchir du vent.


Le scénario se répète, je dévale les pentes à 15 km/h en pédalant. Ça devient ridicule par endroit. J'imagine les automobilistes hilares à la vue de cette scène grotesque du cycliste qui fait du vélo stationnaire à contre-rafale, le faciès tordu à l'effort en descendant une côte. J'en profite pour faire des photos, car le décor est rempli de surprises.


J'ai dû prendre autant de temps à faire les derniers 40 km que les premiers 80. Je suis arrivé à Dubois (2100m) passé 16:00. Ici, on prononce Dou-Boys. C'est fascinant de voir toutes ces traces des Français qui sont passées à la postérité sur les cartes, mais qui se sont transformées dans la langue de l'habitant. Demain, je vais passer dans le Parc Grand Teton. Peu d'Américains réalisent l'image concupiscente qui animait l'explorateur à la vue de cette montagne et la plupart ne tolèreraient pas que ça s'appelle le parc du Great Tit, n'est-ce pas ?


Dans les articles qui précèdent mon départ, quand je décris le contenu de ma besace, je précise que j'apporte mon lecteur iPod pour pouvoir écouter Pierre Lapointe au Kansas. Qu'on soit au Kansas, au Missouri ou au Wyoming, écouter de la musique québécoise au beau milieu d'un environnement complètement étranger à ces mots a un effet magique. Avoir Gilles Vigneault, Les Trois Accords, Malajube et les autres dans les oreilles, sachant que moi seul ici peut comprendre cette poésie, c'est comme être le seul à connaître un code secret. Essayez-ça dans votre prochain voyage, c'est génial. Connaître le français en Amérique, c'est une richesse insoupçonnée.


Demain, après un nouveau passage de la Continental Divide à 2900m, je vais me retrouver dans le Parc Grand Teton. De là, si le vent le permet, ce pourrait être l'entrée dans Yellowstone, mais comme le vent démontre peu d'indulgence dans les derniers jours, vaut mieux ne pas trop prévoir à l'avance. Vent de purgatoire.


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4 commentaires:

Unknown a dit...

Pour ta question concernant le parc:John Colter qui, en 1806, arriva dans les parages à la recherche de peaux de castor, fut sans doute le premier homme blanc à pénétrer dans cette région autrefois inhospitalière, où seuls les Indiens Shoshone venaient, de temps à autre, chasser l'élan. Les coureurs de bois, les négociants, les trappeurs et les éleveurs de bétail francophones précédèrent l'établissement, dans les années 1880, de fermiers qui comprirent rapidement que le pays était trop froid, trop peu fertile et trop élevé pour produire des récoltes satisfaisantes.

Anonyme a dit...

Je pense que Monia commence à manquer son homme! Éric parle de Grand Teton et voilà que Monia écrit dans la même phrase "homme blanc" et "pénétrer".

Michael

Unknown a dit...

Salut Éric,

Je ne sais pas qui a baptisé le parc en question, mais je soupçonne fortement celui-ci d'être un des ancêtres direct de la bonnefemme Teton de Whitworth...

Fais attention à Yogi quand tu seras dans Yellowstone...

Lâche pas!
Vent d'endurance!

Jeepee

macaire a dit...

Après le Davinci code, voici le Cannondale code. La traversée de la nation qui parle le Think big s'tie, en français! C'est poétique en tabarn...

Pour ce qui est de t'accompagner de façon géologique, pas de problème. Tu traverses une région géologique dominée par les épanchements magmatiques. Les glaciers qui ont suivi cette activité volcanique, ont fait en sorte que le paysage à subit une forte érosion. Il reste des vestiges de pierres volcaniques qui sont très résistantes à l'érosion et qui semblent sortir du relief sédimentaire.

Si tu passe par Yellowstone, tu pourra dire que tu as pédalé sur la croute qui recouvre l'un des plus grand dôme magmatique recensé sur Terre.

Si tu arrive à voir les Grands Tétons de ton Cannondale, ces Tétons auront alors vue un deuxième Paradis. Un Macaire en 1991 et un Éric en 2008.

P.S. En labourant le terrain de golf en se dimanche matin du 20 juillet, j'avais une maudite belle ronde de golf, les deux pieds dans la piste cyclable pour rejoindre le trou numéro 17 et des cigales qui chantaient dans les arbres. C'est bon d'être vivant sur un continent comme le nôtre, avec toute cette liberté.

Bon vent!