jeudi 17 juillet 2008

Jour 34: Sur l'autoroute !

97 km. Cum: 4940 km.


Rawlins, WY - En écartant le rideau à 6:45, j'ai vu partir les 2 cyclistes qui étaient installés dans le camping. S'ils vont vers l'ouest, je vais sûrement les rejoindre. J'avais vu la tente et les vélos hier soir, mais pas de trace des pédaleurs. Je vais déjeuner au Bear Trap Cafe, la même place où j'ai soupé hier soir. Tout le monde a l'air à moitié éveillé, les cowboys gardent leur Stetson pour manger. Seule la serveuse a l'air d'avoir bu un pot de café avant d'ouvrir la porte.


Je pars à 8:00, bien habillé. C'est limite pour le cuissard long, mais le fond de l'air est frais (Ça m'a toujours fait rire cette expression). Le doux roulis de la veille se continue sous un ciel voilé. Jusqu'à Saratoga, je roule le long d'un ruisseau qui est en fait le bras nord de la rivière Platte. Avec un nom pareil, c'est sûrement un affluent du lac Penché. Dans ce coin-ci du Wyoming, on dirait qu'on est entouré de dunes de sable couvertes de tapis gazon magané. En fond de décor, quelques pics rocheux égarés. Quelques arbustes très chétifs et des fleurs sauvages ajoutent du jaune vif et du vert olive au jaune sec et sablonneux. Il y a toujours des vaches au loin qui picotent le coteau et ça sent bon la sauge.


À Saratoga, je me déculotte, reprends ma tenue habituelle et me remets en selle. Je perds de l'altitude au compte-goutte, devant parfois faire un petit effort pour coiffer une colline pour ensuite ne plus pédaler pendant un km. Pour une dizaine de km, il y a dans l'asphalte des joints de dilatation d'usure vraiment casse-cul. Sur près de 5000 km, je calcule en avoir souffert une bonne centaine à cause de ces craques. Parfois, elles sont colmatées par un genre de gomme noire qui ramolli à la chaleur. Perpendiculaire à la voie, ce remplissage n'est pas mal, mais dans le sens de la longueur, c'est un tue-cycliste. J'ai failli me casser la gueule à Kremmling avant hier. Dans le Tour de France, il y a une couple d'années, le meneur du peloton s'était vu le derrière dans une chute mémorable en collant dans cette gomme de route. Lance Armstrong, qui était dans sa roue, a pris le clos sans chuter, a coupé le virage et continué comme si rien n'était arrivé.


Après avoir photographié des bœufs gigantesques à l'entrée d'un ranch, j'ai aperçu la tête de peloton faisant la pause. J'ai ainsi rejoint Yann et Tania, un couple belge, qui ont pris un congé sans solde pour venir pédaler la TransAm Trail. Atterris à Washington, DC à la fin mai, ils ont dû attendre une semaine avant que les vélos ne les rejoignent. Ce n'est pas la première fois que j'entends une telle histoire d'horreur. Pourtant les vélos sont toujours enregistrés dans des boîtes ou des sacs spécialement conçus. Égarer un stylo, une clé, une brosse à dent, je comprendrais, mais un vélo de 15 kg. Ils les ont récupérés, mais pas en même temps, car en plus de British Airways, FedEx s'est aussi mélangé dans ses codes-barres. Ils ont gardé le moral et pourraient maintenant s'engager comme guide touristique dans la capitale américaine.


C'est une bonne chose de les avoir rencontrés, car je suis encore dans la section qui n'est pas chargée dans mon GPS. Un rapide coup d'oeil à leur carte me rassure pour la route jusqu'à Rawlins et me confirme que nous devons rouler un bon 15 km sur l'autoroute ! Avant de larguer Yann et Tania qui feront la pause à Wolcott, je leur dis qu'il y a sûrement un dispositif spécial de protection sur l'accotement et des avis pour les automobilistes, car l'espérance de vie à l'extérieur d'une voiture sur l'autoroute est de 7 minutes. L'ACA a dû travailler fort auprès des autorités juste pour faire accepter que des cyclistes puissent utiliser l'autoroute.


Croyez-le ou non, il n'y a aucun avis, aucune affiche, aucun dispositif. Il y a bien des grooves à droite de la chaussée comme partout, mais rien d'autres. Ne cherchez pas de photos de cette portion, je me suis dévissé les jambes, un œil en avant et un autre dans le miroir dans cette portion terrifiante, surtout quand on connaît les statistiques. J'imagine que Yann et Tania ont pris une pause aux 7 minutes pour remercier le ciel d'être encore en vie... ...du moins je le souhaite.


À Sinclair, je quitte ce cauchemar à moteur pour traverser un parc industriel. Sinclair, c'est le village où se trouve la raffinerie de la compagnie du même nom, comme si les gens de St-Romuald restaient à Ultramar. À Rawlins, je suis accueilli par un Boulevard Taschereau à l'hébergement hors de prix. Comfort Inn et Holiday Inn à 169$ ! Eille woah, je vais au Hilton à Québec à la moitié de ce prix-là, mais la femme en arrière du comptoir ne sait pas c'est où Québec. J'ai fini au Days Inn pour un prix plus modique.


Arrivé à 12:30, je suis encore dans la situation où continuer se traduit en 200 km de plus. Ce bout d'autoroute ne méritait pas de faire partie de la randonnée épique qui devra me mener à Lander. Alors, on part de bonne heure demain et on se repose aujourd'hui. D'ailleurs, j'ai attrapé un petit rhume. C'est sûrement suite à la descente glaciale à Breckenridge et le fait d'avoir serré la main de Todd le lendemain. Todd n'arrêtait pas de renifler en me parlant. Il a dû me refiler un Todd'microbes. Vent de rhume.


41.7917, -107.2122

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